La temporalité chez Soren Kierkegaard

Jean Nizet

pp. 225-246

Le propos de cette étude est de questionner la manière dont Kierkegaard pense la temporalité de l'existence. L'auteur examine successivement la temporalité de l'esthéticien, de l'éthicien et du croyant. L'esthéticien vit, dans l'extériorité du désir et de la jouissance, un pointillisme de l'instant. Mais l'intensité de l'instant ne survit pas à l'étalement du temps. Le temps de l'éthicien est le temps du choix. Il présuppose un choix premier, non questionné par Kierkegaard, celui de l'intériorité qui doit se conquérir sur le temps. La fidélité de l'époux, dont la figure sert ici de paradigme, ne conquiert l'éternité sur et dans le temps que par la répétition. Le temps de la foi est celui de la victoire décisive de l'éternité sur le temps, l'instauration par Dieu d'un temps nouveau. L'auteur remarque la parenté du temps de l'esthétique et du temps de la foi, entre lesquels d'ailleurs l'existence de Kierkegaard a oscillé sans cesse. Dans l'instant l'éternité touche le temps, même si dans l'instant de la jouissance ne se joue qu'une parodie d'éternité. L'éternité de l'éthicien doit au contraire se conquérir; elle est le temps de la rencontre. Mais Kierkegaard la fuit, craignant de se perdre lui-même dans la présence à l'autre. Hanté par l'idée d'une subjectivité punctéiforme sans corporéité, Kierkegaard se trouve réduit à en appeler au Tout-Autre conçu comme extériorité sans corps, ne mettant pas en péril l'immanence du sujet.

Publication details

Full citation:

Nizet, J. (1973). La temporalité chez Soren Kierkegaard. Revue philosophique de Louvain 71 (10), pp. 225-246.

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